Commun et appartenances nationales · Bruno Karsenti

Bruno Karsenti, philosophe, enseigne à l’EHESS depuis 2006, après avoir enseigné à l’université de Lyon et de Paris I. Il est notamment l'auteur de "D’une philosophie à l’autre" (Gallimard, 2012) ; "La question juive des modernes" (PUF, 2017) ; "Socialisme et sociologie" (avec Cyril Lemieux), éd de l’EHESS, 2017.

Les difficultés que nous avons aujourd’hui à aborder le thème de la nation sont évidentes, elles sont perceptibles tant dans le débat scientifique que dans l’opinion. La guerre actuelle que nous vivons au sein de l’Europe ne fait que les accuser. À première vue, le conflit se ramène à l’affrontement entre une conception européenne de la nation, nourrie des idéaux démocratiques européens, et un nationalisme autoritaire qui, par l’usage qu’il fait de la force brute, du déni des institutions représentatives et du respect des libertés, s’y oppose frontalement. Ce qui est néanmoins sensible, c’est que l’évidence de notre engagement auprès de l’Ukraine ne s’accompagne pas de la même évidence quant à la distinction que nous faisons entre nation et nationalisme, et du commun qui réside dans l’appartenance à la nation du point de vue qui soit spécifiquement européen.

En défendant cette nation dans ses droits à l’existence, nous sommes unanimes sur ce que nous abhorrons, sur ce que nous ne sommes pas et ne voulons pas être, mais sans être vraiment au clair pour autant sur ce qui, positivement, nous réunit quant à ce que nous voulons être. Ce sont ces questions que cette conférence se propose d'éclairer.